Toujours soucieux de te donner du plaisir, à toi, lecteur de ce modeste blog, le Bicéphale t'a trouvé un superbe vin.
Une bouteille à dégoupiller en toute occasion, pour l'anniversaire du petit, le passage du contrôle technique de la voiture, pour fêter la fin d'une gastro et, même, pour honorer le repas d'un mariage...
Un vin ultime de plaisir.
C'est bien (trop) connu, tous les goûts sont dans la nature.
C'est amusant d'ouvrir une bouteille entre amis et de voir des réactions dimétralement opposées...
Tantôt, la pupille se dilate, un râle d'orgasme s'échappe.
"Sa mère la p..., comment y démonte trop ton vin!" (mes amis ont un langage fleuri qui, parfois, me surprend).
A priori, c'est l'extaxe.
Parfois, le verre est gentiment bu, la bouteille est torchée, mais sans aucun commentaire.
La discussion ne dévie pas des derniers exploits sexuels de Laureline ou de la provenance de ce saucisson sec (n'y voyez aucun amalgame).
Le vin participe au repas, l'accompagne, mais ne retient pas l'attention des convives.
Rarement, le verre est violemment posé sur la table, les visages deviennent grimaçants.
Les insultes commencent à fuser, entre deux épisodes de nausées.
On parle de mes goûts de (je cite) chiottes...
Là, le vin n'a pas plu...
Cela peut être déroutant de boire une même bouteille, dans un relatif même état d'esprit, et d'avoir ces trois réactions en même temps pour les trois personnes qui croisent le verre avec vous...
Le premier pleure de joie et vous embrassant, pendant que le deuxième se demande pourquoi Loana est devenue si grosse, alors que le troisième vous fixe du regard en pensant à une future vengeance froide et sans pitié.
Alors quand on a la chance de faire l'unanimité de 120 personnes lors d'un mariage, là, je dis bravo monsieur Boyat!
Les irréductibles du "vin blanc only", les amoureux des vins légers et fruités, ceux qui préférent les tanins, les amateurs, les occasionnels.
Tous sont venus me voir pour féliciter les choix du vin rouge.
La pari était risqué, nous avions décidé de proposer un vin rouge sur l'entrée et poursuivre ensuite sur un vin blanc du mâconnais de Guy Blanchard.
Et quelle entrée...
Foie gras de canard poché au vin rouge, aspic de foie gras et légumes à la gelée de cassis et compotée d'oignons...
Le gamay, cépage phare du Beaujolais, présent en Loire, dans le sud de la Bourgogne, trottait dans ma tête.
Après moultes dégustations, les vins de Pierre Boyat se sont imposés.
Ce vigneron, sorti de la coopérative en 2004, a la chance d'habiter sur les hauteurs de Leynes, à l'extrème sud de la Bourgogne.
De chez lui, on a une vue magnifique sur le Beaujolais.
En conversion biologique, Pierre Boyat a décidé de ne plus souffrer ses vins pour ne plus les dénaturer, pour s'accrocher le plus possible au terroir et être fier de sa production.
Des raisins sains, une vinification respectueuse...
Le tout avec un grand dynamisme, Pierre est un des organisateurs du salon des Biojoleynes.
"Le Bois de Leynes" de Pierre Boyat a remporté la timbale lors de nos dégustations.
L'étiquette est sobre, jolie.
Aucune mention n'est faite de la conversion en agriculture biologique.
Le vin est classé en "vin de France", classification la plus basse, mais qui permet au vigneron sérieux de s'exprimer sans contrainte.
Aucune contre étiquette non plus...
Impossible de deviner que le vigneron ne souffre pas ses vins.
C'est plutôt une sensation de sobriété, toute en retenue, qui se dégage de la bouteille.
D'une belle couleur violine claire, le vin fait briller le verre.
Le nez est plutôt discret, intégralement tourné vers le fruit rouge.
En tournant un peu le verre, des notes de fleurs remontent, pivoine, et même quelques fragrances de rose.
Ca sent le plaisir.
Quelque chose de régressif et enfantin qui ne peut pas se refuser.
En bouche, le vin évolue en même temps que le buveur.
D'abord timide, le vin prend confiance et envoie des brassées de fruits rouges et noirs.
Après deux, trois gorgées, le vin s'offre totalement.
Des tanins fins, un fruit croquant et mûr qui se termine par une petite pointe d'acidité pour vivifier la bouche.
Extase... Râle de plaisir...
Une gourmandise, facile, évidente.
L'accord était juste parfait.
Le vin lavait le gras du foie pour en magnifier le goût.
L'aspic à la gelée de cassis complétait la palette aromatique du gamay.
L'acidité finale, bien que très légère, repondait au sucre de la compotée d'oignons.
Un temps fort.
Surtout que, bu le lendemain sur une petite charcuterie, le vin était toujours aussi généreux...
Si vous avez la chance de passer dans le sud du mâconnais, tout près de la roche de Solutré, faites un détour par le lieu-dit Bois de Leynes, dans les hauteurs du village de Leynes pour goûter les vins de Pierre Boyat, après un petit coup de téléphone 03 85 35 12 42.
Car, en plus de faire du grand vin, l'accueil est hautement sympathique, les dégustations sur fût laissent présager aussi de belles bouteilles dans un futur proche.
Un vigneron qui reprend plaisir à faire du vin après des années de carcan dans une coopérative.
Un vigneron fier de son vin, car il y a mis une part de lui-même.
De la générosité, de la fraicheur, du peps.
Sans concession.